Le dernier cycle des discussions autour du Grand barrage éthiopien de la Renaissance (GERD), entre l’Égypte, l’Éthiopie et le Soudan, qui se tenait en République démocratique du Congo depuis dimanche dernier, s’est rompu mardi 6 avril 2021.  

Daouda Mbaye

Le saviez-vous, à eux seuls l’Égypte et le Soudan utilisent 85 % des eaux du Nil, respectivement pour 65 % (48 milliards de m3) et 15 % (4 milliards de m3), alors que 32 milliards de m3 se jettent en Méditerranée. Pourtant, ce fleuve traverse ou longe quelque 9 États, à savoir la Tanzanie, le Burundi, le Rwanda, la RDC, l’Ouganda, le Kenya, l’Éthiopie, l’Érythrée, le Soudan (devenu 2 pays distincts) et l’Égypte. La répartition des eaux de ce long fleuve est instruite par l’histoire contemporaine qui renvoie à la signature de deux Accords d’abord en 1929, puis en 1959. Des accords qui ont été signés par l’Égypte et le Soudan, en faisant abstraction totale des États restants et qui donnaient le droit de veto à l’Égypte sur tout projet en amont… Lorsqu’en 2011 l’Éthiopie a décidé la construction du Grand barrage de la Renaissance sur le Nil, l’Égypte et le Soudan ont été de plus en plus préoccupés. L’Égypte a même menacé de le détruire…

La guerre de l’eau aura-t-elle lieu ?

Depuis un certain temps, les trois parties cherchent à trouver un terrain d’entente. Dernier round des pourparlers, une rencontre organisée par la République démocratique du Congo (RDC), entre les ministères des Affaires étrangères des trois pays (Égypte, Éthiopie et Soudan) a débuté dimanche dernier à Kinshasa. Elle s’est prolongée jusqu’au mardi 6 avril, pour s’interrompre brusquement. Pour le chef de la diplomatie égyptienne, l’Éthiopie manquait de « volonté politique de négocier de bonne foi ». C’est du moins ce qui est ressorti d’un communiqué qui a été rendu public. L’Égypte craint que le barrage mette en danger ses approvisionnements en eau du Nil, tandis que le Soudan est préoccupé par la sécurité du barrage et l’eau s’écoule à travers ses propres barrages et stations d’eau.

L’Égypte avait déclaré que cette dernière réunion représentait la dernière chance de relancer les négociations, avant que l’Éthiopie ne commence à remplir le barrage pour la deuxième année consécutive, après le début des pluies saisonnières cet été.

A noter qu’avant le dernier cycle de négociations, Abdel Fattah el-Sissi, président égyptien, a déclaré qu’il y aurait « une instabilité inconcevable dans la région » si l’approvisionnement en eau de son pays était affecté par le barrage de la Renaissance.

Rétablir les équilibres d’Accords « iniques »

De toutes les façons, à Kinshasa, les délégations des trois pays espéraient trouver une percée dans les négociations sur un projet que l’Éthiopie considère comme essentiel à son développement économique. Le Soudan et l’Égypte se sont mis d’accord sur une proposition visant à inclure l’Union européenne, les États-Unis et les Nations unies dans les pourparlers, ainsi que les médiateurs de l’Union africaine.

Si Mariam al-Sadig al-Mahdi, ministre soudanaise des Affaires étrangères, a déclaré mardi que l’insistance de l’Éthiopie sur de telles mesures unilatérales représentait une violation du droit international, son homologue éthiopien brandit le droit de son peuple à exploiter une ressource qui traverse son pays et/ou qui y prend naissance… la famine des années 80 est encore récente dans les mémoires, pourtant le Nil coulait toujours à travers le pays.

Comptant sur une nouvelle approche des négociations, la ministre des Affaires étrangères du Soudan trouve qu’il y a encore un espoir pour éviter que l’Éthiopie impose un fait accompli et mette tous les peuples de la région en grave danger.