La 5ème édition de l’African Business & Social Responsibility Forum s’est tenue les 22 et 23 septembre 2021 à Marrakech, au Maroc. Cette année, la rencontre a porté sur « Repenser la RSE en Afrique pour déconfiner sa raison d’être ».

Daouda Mbaye, ES à Marrakech

La RSE (Responsabilité sociale de l’entreprise) doit aller au-delà des clichés et s’imposer au niveau stratégique. Aujourd’hui, en dépit des contractions budgétaires, elle doit être au centre du développement d’un modèle d’entreprise durable. Dans son discours d’ouverture, Stéphane Moudouté-Bell, Directeur général du Cabinet Latitude Monde et Commissaire général de l’African Business & Social Responsibility Forum, l’a rappelé. Il s’est réjoui que Marrakech accueille pour la seconde fois la rencontre qui réunit entrepreneurs, décideurs du public, universitaires, étudiants et membres de la société civile.  Introduisant une édition de l’African Business & Social Responsibility Forum – un hashtag est né #ABSRF – particulière à double titre, parce que dans un contexte mondial marqué par la Covid-19 et du haut de ses 5 ans, il n’a pas omis de remercier les Amis durales de la première heure, tout en donnant rendez-vous aux participants en 2022.  Il a cité, tour à tour, SE Ameenah Gurib-Fakim, ex-Présidente de l’Ile Maurice, Didier Acouetey, PDG d’Afric Search, Alioune Guèye, Président du groupe Afrique Challenge, Joëlle Ededeghe Ndong, journaliste à Canal+, Aphrodice Mutangana, Directeur des opérations à Digital Africa… Avec l’âge, le cru se bonifie. De Maurice à Marrakech, en passant par Kigali, #ABSRF est devenu une force de proposition au secteur privé africain, auquel il encourage de s’approprier le concept RSE. Pour le Commissaire général de la rencontre, la pertinence de la plateforme #ABSRFest renforcée par le Stress test géant dont fait office la Covid-19 pour la RSE. Justement, il trouve que le caractère inédit de cette pandémie a mis en exergue l’importance que revêt la RSE pour la résilience des entreprises face à des chocs exogènes.

Repenser la perception du durable
Une véritable implication de la gouvernance dans les entreprises et organisations pour l’inscrire dans une logique d’écosystème créatrice de valeur partagée au centre d’une transformation devant décomplexer la RSE du lointain et l’adapter à un monde volatile, incertain, complexe et ambigu, est devenue une nécessité, a encore noté ce défenseur infatigable du concept. Pour le Directeur Général du Cabinet Latitude Monde, il est temps de substituer une RSE « subie », trop souvent arrimée au diktat de l’image, à une RSE « voulue » et véritablement inclusive. Il a ajouté que ce sont des engagements RSE sincères qui sont capables d’apporter des faisceaux de réponses agiles aux nouvelles questions sociales, économiques et environnementales et concourir à la raison d’être de cette démarche afin qu’elle puisse contribuer de manière qualitative au bien-être collectif des différents espaces. Souhaitant deux jours d’échanges passionnants à même de produire des éléments d’appréciation sur des sujets tels que l’urgence d’une réponse climatique « glocale » face à la multiplication des catastrophes naturelles, les conséquences du stress thermique, les risques et opportunités du Phygital, la communication responsable et le marketing durable, la formation aux métiers qui n’existent pas encore, le financement des objectifs du développement durable, l’investissement communautaire et les mécanismes d’autonomisation des bénéficiaires… Stéphane Moudouté-Bell a annoncé le lancement du Baromètre du forum qui s’inscrit dans la dynamique de résilience de la RSE et remercié les autorités marocaines, la région de Marrakech-Safi, les Ami(e)s durables, les partenaires.

Placer l’humain au cœur du dispositif
La matinée du mercredi 22 septembre 2021 a été ponctuée d’une première conférence sur « Les nouvelles réalités de la RSE en Afrique », suivie d’une seconde, portant sur « De la nécessité de coopétir pour des investissements à impacts positifs ». Du Phygital, il y en a eu, dans la mesure où Mme Ameenah Gurib-Fakim, ex-Présidente de l’Ile Maurice, est intervenue en visioconférence, dans le premier panel animé par Didier Acouetey, PDG d’Afric Search, où les autres speakers ont été Pr Raja Aghzadi, Chirurgienne et présidente de l’Association Cœur de Femmes, Naoufal Mahdar, chargé de la décarbonation à l’OCP.
Si en introduction des échanges, Didier Acouetey s’est réjoui qu’on allât parler des vraies choses, d’une RSE beaucoup plus structurante, beaucoup plus engageante, Ameenah Gurib-Fakim, en visioconférence, s’est interrogée sur le rôle et la participation de la femme dans la structure des lois devant déterminer une politique de santé. Face au faible taux d’à peine 23% de femmes à la tête des prises de décision selon l’OMS, elle se demande comment créer ce vivier de femmes compétentes.

RSE et souveraineté agricole
Pour l’ex-Présidente de Maurice, le statu quo n‘est plus permis, en dépit du manque de moyens dans la mesure où il est possible d’engager le maximum de partenaires. Justement, elle salue le travail de Stéphane Moudouté-Bell à ce niveau pour éveiller les consciences et apporter l’adhésion des gouvernements et grands comptes. Elle fera remarquer qu’en Afrique, au sud du Sahara, face à la perte d’emplois, l’émigration (clandestine), les phénomènes du changement climatique (on va vers 2,5 °C à l’échéance de 50 ans…), lorsque les pays prennent au sérieux la participation de la femme aux efforts de formation, d’investissement et de prise de conscience, les résultats sont probants. Elle en veut pour preuve la Covid-19 qui a fait ressortir ce potentiel. Et elle déplore que dans cette sous-région, on n‘ait pas encore compris la notion de souveraineté agricole (66% des terres arables en Afrique et Agriculture Smart), d’investissements sur l’écosystème, la formation, la science et la femme. Relativement aux moyens, certes le président Biden démontre après 5 ans une volonté de recapitaliser le Fonds Vert, mais est-ce suffisant, s’est-elle interrogée. « La biodiversité est la branche sur laquelle nous sommes assis… il y va de l’avenir de l’humanité. Il importe ainsi de revoir la part des grandes entreprises dans une RSE qui rime avec développement durable, dans le sens le plus large du terme », a-t-elle conclu.
Pr Raja Aghzadi a salué la persévérance de l’initiateur et maître d’œuvre de la rencontre, Stéphane Moudouté-Bell, dans ses efforts inlassables pour introduire la RSE en Afrique. De son avis, les Amis durables sont en train de marquer l’histoire. Après avoir remercié les organisateurs du forum de lui donner l’occasion de s’exprimer sur la RSE en tant que chirurgienne. Les médecins sont les plus à même de constater les effets des changements climatiques, avec des taux de cancéreux alarmants (1/8), de maladies auto-immunes, un coût sanitaire très lourd, nous apprend-elle. La mondialisation et le capitalisme sauvage ne doivent pas occulter le droit à la santé pour tous, à défaut de scier la branche sur laquelle nous sommes assis, a soutenu la présidente de l’Association Cœur de Femmes. Pr Aghzadi a souligné que la pandémie est venue comme un ouragan nous rappeler que la santé est essentielle et a accéléré cette prise de conscience que l’humain est au centre. À juste titre, elle lance un appel à être tous ensemble, y compris la société civile, en RSE. « Ce n’est pas un phénomène de mode, mais à introduire plus que jamais dans nos entreprises », nous confie-t-elle. Tour à tour, la chirurgienne évoquera la sécurité au travail faisant allusion à ce dramatique incendie dans une usine de textile au Bangladesh, les actions de la jeune militante Greta Thunberg, la prospective du père de l’agroécologie Pierre Rabbi, pour signifier l’importance d’instituer davantage et investir en RSE quoi que cela coûte pour atteindre un développement durable avec des corps en bonne santé. Pour y arriver, il faudra informer, former et sensibiliser les citoyens, a martelé ce Pr de médecine engagée.

Plus de renouvelable et de frugalité
Pour Naoufal Mahdar, la RSE commence par une bonne gouvernance. Justement, au sein de l’OCP (Office chérifien des phosphates), institution qui revendique 75% des réserves mondiales de phosphates et que les engrais assurent la moitié de la production mondiale de nourriture, il y a 15 ans y existait une Direction bonne gouvernance… Après ce bref historique pour prouver la décarbonation, reste un pilier important. Naoufal Mahdar a dépeint un groupe engagé dans la RSE qui a toujours eu de très bonnes places dans les agences de rating y afférentes. En matière de décarbonation, ce responsable a partagé toutes les actions de son groupe en matière de consommation d’énergie électrique, à hauteur de 86% par cogénération et énergie éolienne, et 30% par utilisation de sources d’énergie non conventionnelle (cogénération et éolien), mais aussi la réhabilitation d’anciens sites d’exploitation, la plantation d’arbres. Ce n’est pas tout,  OCP Group a une feuille de route ambitieuse et compte mobiliser plus de moyens et sur son engagement communautaire à OCP Africa, notamment via Agri Booster en Afrique dans tout ce qui a trait à la customisation des engrais par sols… a-t-il conclu, non sans mentionner l’Université UM6P érigée par OCP à Benguérir, localité située à quelques kilomètres de Marrakech, et devant profiter à tout le continent en termes d’investissement sur l’éducatif, la responsabilité sociétale, plus rentable sur le long terme.

Après avoir exprimé la joie de retrouver les Amis durables, Alioune Guèye, PDG de L’Afrique qui Ose, fera un plaidoyer à la femme, à son travail, avant de défendre que la santé soit le seul secteur où il n’y a pas d’économie d’échelle. Au chapitre de l’éducation et de la formation, il interrogera l’assistance « Aujourd’hui à qui appartient l’entreprise ? ». En réalité, l’entreprise appartient à la fois aux actionnaires, au territoire, aux consommateurs… croit-il. Cette question de l’ownership, démontrera-t-il, OCP Group l’a intégrée et mise en place des écoles d’excellence, telles que les Écoles 1337, UM6P. Pour lui, nos pays ne peuvent pas se permettre de sacrifier des profils excellents. Le concept de Donut Economics ou économie circulaire, cadre visuel pour la durabilité de l’économie, qu’il rappellera, voudrait qu’on aille vers plus de renouvelable et de frugalité, qu’on s’inspire des zones traditionnelles où il n’y avait pas de gaspillage et retrouver les équilibres, et qu’on évite le mimétisme à tout prix. De son avis, Covid-19 a été révélateur et pose avec acuité la question de la RSE qui est une question sérieuse, un vrai sujet qui nous interpelle. Elle doit être prise en compte dans un contexte de développement des organisations dans leur environnement, poursuit-il. En 20 ans, l’amoncellement des ressources donne le tournis. Pourtant, on est habitué au crash-test, mais celui de la Covid-19, mouvement simultané, a secoué la terre entière, a défendu le PDG du groupe Afrique Challenge. Dans un tel contexte, il s’agit de savoir comment faire impliquer chaque collaborateur. Pour répondre à cette interrogation et à toutes les autres, Alioune Guèye préconisera la sensibilisation plutôt que du Green Washing ou verdissage (marketing pour communiquer auprès du public en utilisant l’écologie de manière trompeuse), faire le lien entre RSE et Business Organisation, et enfin adopter une approche d’intelligence collective à diffuser sur toute la ligne de management qui gagnerait à se l’approprier pour minimiser les risques d’échec.    

Coopétir pour des investissements à impacts positifs
Dans la seconde session, « De la nécessité de coopétir pour des investissements à impacts positifs », modérée par Joëlle Ededeghe Ndong, journaliste à Canal +, Nadia Benbahtane Directrice marque & engagement d’Intelcia, déclinera d’abord les valeurs du groupe transnational (We Dream, We Care, We Do) avant de préciser que, de nos jours, les clients souhaitent traiter avec des entreprises socialement responsables. « Pour Intelcia, qui accompagne sur le long terme des acteurs de l’économie solidaire et sociale, tels que Moroccan Magic, la pérennité de l’entreprise, la RSE coule de source », a-t-elle souligné. Certes, comme une bonne partie des opérateurs, Intelcia a dû se réinventer pendant la Covid-19, a su innover (flotte de transport adaptée, co-voiturage encouragé), mais véritable machine de formation. Le groupe a concouru à accompagner des coopératives d’artisans, des startups à fort potentiel à mieux se structurer, à adapter les marques aux consommateurs, à adopter des moyens de livraison écoresponsable… a rappelé Nadia Benbahtane, citant les exemples de Pikala à Marrakech, d’une startup sénégalaise, ou encore de Moroccan Magic. Sur le rôle des États et localités, elle tablera sur une mobilité à créer à condition qu’existent des infrastructures adéquates, une communication en continu, afin que collaborateurs et citoyens coopèrent à un niveau un peu plus élevé, pour assurer un ancrage territorial allant jusqu’à faire des collaborateurs des citoyens modèles.

À juste titre, et en tant que recruteur international, Didier Acouetey reviendra sur ce qui dicte le choix au travail des étudiants fraîchement sortis de Harvard qui n’est plus porté sur le salaire, mais sur l’engagement sociétal, son respect du développement durable. Ensuite au fil des échanges, il insistera sur la manière de recréer une nouvelle façon de travailler, apprendre au capital humain à travailler ensemble. Il trouve qu’un modèle de coopération existe, quel que soit le secteur d’activité. Pour lui, il s’agit de sortir de ce type de contrat où on travaille en solo pour aller vers une sensibilisation sur toute la chaîne. L’exemple du menuisier qui travaille sur du bois et ne se rend pas compte de sa contribution à la déforestation est patent. La remarque de Didier Acouetey sur l’aménagement des espaces en Afrique où une configuration dans les villes avec beaucoup de piétons et peu de transport en commun, versus des campagnes quasi désertes, poussera à repenser l’urbanisation. Au-delà, le PDG d’Afric Search nous invitera à aller vers des villes intelligentes. Il croit que la chance de l’Afrique est de réinventer des villes nouvelles durables.

Quant à Lamiae Benmakhlouf, Directrice générale de MITC-Technopark, elle assurera que l’entité qu’elle dirige a fait preuve d’une grande résilience. À ceux qui croyaient que le business model de Technopark n’était plus pérenne, a été opposé l’intelligence collective, une solidarité immédiate qui a permis de préserver les emplois en sécurité, entretien… des gratuités ont été accordées aux startups vulnérables, d’autres ont reçu des commandes… Résultat des courses, l’année 2020 a été la meilleure de Technopark. Lamiae Benmakhlouf s’est félicitée que le maintien et le développement de l’écosystème se sont substitués à l’égosystème. Cela a été possible, parce que Technopark a la RSE dans son ADN (pensé d’abord PPP), a-t-elle mentionné avant d’ajouter que toutes les startups ont épousé un tel mindset. En effet, elles sont évaluées sur l’impact créé et quand elles quittent le bâtiment, elles renforcent la cohorte d’Alumni.  C’est la suite logique, vu que dès 2010, avec l’installation de panneaux photovoltaïques, le siège de Technopark s’est inscrit dans le développement durable avec plus d’acuité. Par la suite, pour l’accompagnement de Smart Cities, telles que Zenata, des plateformes se sont multipliées notamment pour produire des feux de signalisation adaptatifs, des scooters électriques… Plus que jamais, la collaboration entre universités, Smart Cities, universités, incubateurs… a été aussi riche, note la DG de MITC.

L’intelligence collective, levier de développement
L’après-midi du 22 septembre 2021, la troisième conférence sur « L’intelligence collective comme levier de développement des territoires » a été animée par Eugène Ndiaye, Directeur général associé de VOO NOO Groupe, Naïma Nasr, Directrice générale de l’INSAF, Isabelle Teboul, Directrice développement durable de la SETRAG, et Dorine Eijkman, Directrice du Centre FIERS & FORTS. Modérée par Alioune Guèye, PDG de l’Afrique qui Ose, cette session a permis à Naïma Nasr de suggérer des innovations en termes de RSE, compte tenu du fait que la RSE est une affaire d’écosystèmes.

À la question du modérateur pour le retour à la terre et accélérer l’intelligence collective par le biais du digital, Dorine Eijkman répondra que le centre qu’elle dirige est déjà informatisé et fait rayonner le village de Tamasloht qui gagne en notoriété grâce à internet. De son côté, Eugène Ndiaye, ajoutera que le siège de son groupe est en province et que le digital permettra de désenclaver les territoires pour peu que les infrastructures existent. S’inscrivant dans ce sens, Isabelle Teboul a souligné que la vision à long terme va dans le sens de la digitalisation.

De concert, les animateurs ont soutenu qu’aujourd’hui on ne réussit pas seul, mais aussi et surtout que le digital permet d’économiser des ressources précieuses et de révéler des talents, ce qui concourt au renforcement des capacités.

Travailler autremen
Enfin, la dernière session de cette première journée, qui fut un retour d’expériences, a porté sur « Les nouveaux enjeux du travail : où se situe votre entreprise », modérée par Joël-Éric Missainhoun, Managing Partner Afric Search, a été animée par Katala Soro, Head of HR Bayer West & Central Africa, Abdellatif Kissami, Directeur développement durable de Managem, Laure Bigourd, Directrice générale de Gabon 24 et Saad Berrada, Directeur des Ressources humaines d’Intelcia. Après s’être brièvement présentés, les speakers ont partagé leurs expériences dans leurs secteurs respectifs pour des solutions et propositions concrètes. 

Ainsi, Laure Bigourd nous apprendra que la chaine TV Gabon 24 s’est lancée dans une démarche RSE depuis 2019, en collaboration avec Stéphane Moudouté-Bell, confortée par une politique RSE depuis 2020. Malheureusement, impactée par Covid-19, la chaine, confrontée à du personnel contaminé, a dû travailler en réseau et trouver des PC dotés de logiciels adéquats et faire du journalisme de solutions, les cadreurs ont temporairement travaillé depuis leur smartphone pour un streaming H 24/, les réseaux sociaux entre autres canaux. Elle salue un personnel qui a su faire preuve d’une grande adaptabilité. Si le Digital News leur a permis de poursuivre la diffusion, les équipes de Gabon 24 ont dû faire face au phénomène des fake news sur les réseaux sociaux. Dans cette bataille de crédibilité, Gabon 24 milite pour une communication à travers des médias conventionnels, l’instauration d’une instance à même de vérifier que chaque entreprise investit une part de son chiffre d’affaires dans la RSE. De la RSE, la vraie, et aller au-delà du curage de caniveaux ou du nettoyage de plage, soulignait-elle naguère dans les échanges.

Katala Soro n’a pas omis de remercier l’organisateur qui a permis à l’assemblée de participer à la journée sans voiture. Chez Bayer, dira-t-elle, l’engagement durable et sociétal est en phase avec le business. En Afrique de l’Ouest et centrale, elle a révélé des financements à hauteur de 70 000 euros qui devraient monter à 1 million d’euros. En 3 étapes, cette responsable de Bayer déclinera l’expérience Bayer en la matière (communication tous azimuts, renforcée par les relais dans tous les pays, proactivité à travers un équipement du personnel et une communication avec les médecins du travail et, enfin, organiser ceux éligibles au télétravail via un modèle hybride.

Et si on faisait la mise à jour de la RSE ?Saad Berrada a présenté une entreprise partie du sud avec à peine 200 employés, qui est en train de s’implanter dans le monde, comptant plus de 30 000 collaborateurs, et dont la fibre RH recoupe la RSE, deux entités qui vont de pair. La crise sanitaire a chamboulé un certain nombre de choses, mais n’a pas altéré le lien entre le collaborateur et l’entreprise à Intelcia, soutiendra-t-il. Dans ce groupe, un élan de solidarité a été le soubassement d’actions menées pour préserver les salaires. De son avis, on oublie souvent que la RSE démarre en offrant des conditions décentes de travail et le développement des compétences. En période de confinement, confrontée à une population de soft skills, Intelcia devait réinventer, upgrader la formation, voir comment assurer l’apprentissage des collaborateurs, considérer l’isolement et le risque sans omettre les impacts sur la partie juridique, les imprévus, la protection des données des clients, notamment en matière de RGPD… nous apprend-il. La crise a été une excellente opportunité pour installer un système hybride (80% du temps à la maison et 1 jour sur site), sachant qu’une expérience pilote a été déjà menée sur le site d’Oujda et qui sera dupliquée sur d’autres territoires. Il retiendra « coopétir » et fait remarquer que la RSE chez eux est d’abord en interne : un pari gagnant. Devenue une préoccupation de directeurs généraux et de chefs d’État, il est temps qu’on passe la seconde et qu’on ressente l’impact RSE des grands groupes. Si la RSE était un logiciel, il est temps de procéder à sa mise à jour.

Chez Managem, Abdellatif Kissami nous apprendra que c’est par des réunions quotidiennes qu’ils sont arrivés à gérer la crise et ne pas stopper leur activité. Arrêter une mine équivaut à des pertes énormes, soulignera-t-il. Lorsque la crise sanitaire a atteint son pic, il y eut un arrêt de 4 semaines, sans que les salaires ni le moindre avantage ne soient touchés, a-t-il dévoilé. Un comité de crise et un accompagnement psychologique ont profité autant aux télétravailleurs qu’aux personnes présentes, dira-t-il, tout en insistant sur le curatif et le préventif pour ces dernières. Outre la communication interne, Managem s’est évertuée à acheter des masques, effectuer des tests PCR et travailler de concert avec les partenaires sociaux que sont les syndicats et délégués du personnel.   

Si pour lui la difficulté réside dans le fait de s’adapter à la période post-crise, Abdellatif Kissami n’en est pas moins revenu sur la période difficile de mars à juillet 2020, pendant laquelle il y a eu du personnel en rétention (3 à 6 semaines), coincé pendant 6 à 8 mois sans voir la famille à l’étranger… C’est alors que des relais ont été mis en place, ainsi qu’un accompagnement aux enfants en classe d’examen par des webinaires, a rapporté ce responsable de Managem habitué de la rencontre.

Un Diner de gala et une Awards Ceremony ont clôturé cette première journée.

Cette année, c’est dans une ambiance bon enfant, non moins marquée par un couvre-feu qui a imposé l’annulation de la traditionnelle sortie pour visiter des réalisations rentrant dans le cadre de la RSE, que 2 Prix ont été remis et un nouvel Ambassadeur nommé. Ainsi le Corporate Award of Innovative Societal Action est allé à Intelcia, tandis que Gabon 24 a remporté le Special Jury Award. Désormais, il faudra dire SE Didier Acouetey qui rejoint le rang des Ambassadeurs. Après SE Alioune Guèye en 2020, il est l’Ambassadeur of the Year 2021.

Enjeux et perspectives d’une communication responsable
Le lendemain, jeudi 23 septembre 2021, a eu lieu la conférence 5 sur « Communication responsable : enjeux et perspectives », modérée par Joëlle Ededeghe Ndong, journaliste à Canal+, et animée par Abdellatif Kissami, Directeur développement durable de Managem, Bénédicte SESS-TCHOTCH, Experte en marketing & Communication, Eugène Ndiaye, Directeur général Associé de VOO NOO Groupe, Laure Bigourd, Directrice générale de Gabon 24, Dounia Chraibi, Responsable de la RSE Corporate d’Intelcia.

D’emblée, Dounia Chraïbi a donné le ton, rendant hommage à ses équipes renforcées par des exploitants agricoles, sans qui la reforestation de 1 600 arbres dans la province de Berrechid n’aurait pu avoir lieu. Pour sa part, Abdellatif Kissami a souligné la difficulté de communiquer par la distribution de flyers de peur de disséminer le virus. Il fallait alors réinventer une communication, notamment celle orientée digitale sans faire l’économie d’un accompagnement psychosocial des collaborateurs, de contacts directs et d’une consolidation autour d’un engagement de sécurité sociale. Eugène Ndiaye confirmera que le consommateur n’a plus le même profil et qu’il faut aller vers une communication responsable qui apporte le bien-être.

Quant à Laure Bigourd, elle a trouvé qu’avoir le label RSE a été salvateur pour Gabon 24. Diffuser de la communication durable a fait rentrer la chaine dans la cour des grands… sachant que les annonceurs ne sont plus dans le one shot, vu que les gens ont envie de s’identifier à de belles histoires, il est grand temps de sortir des sentiers battus.

Bénédicte confortera quelque peu cette communication via une storytelling qui valorise la raison d’être quelle que soit la taille de l’entreprise. La réactivité, à travers une cellule de crise mise en place, permet de communiquer les résolutions et les bonnes décisions… Elle fera effectivement un cours magistral à l’assistance sur la communication comme partie intégrante du marketing, y compris le marketing mix avec 4P + P …celle relative à la RSE intrinsèque et extrinsèque, etc.

Dounia Chraïbi réitérera les valeurs de Intelcia, à savoir We Dream, We Care, We Do, qui, pendant la pandémie, leur ont permis de savoir comment faire face. Le Live sur Facebook du PDG du groupe a été une réponse adéquate aux attentes des employés. D’un coup, les appréhensions en termes de pertes d’emploi se sont estompées… compte tenu du fait que l’ADN du groupe tourne autour du Service, il était difficile de faire l’impasse sur l’humain, soutiendra-t-elle. Dans une entreprise de service, il est difficile de faire du Green Washing tant l’environnement reste un sujet, a défendu Dounia Chraïbi. Si chaque entreprise est spéciale, elle trouve qu’il faut un équilibre entre la transparence, la vérité de son message qui ne soit pas misleading… asseoir une relation de confiance, dans la mesure où la réputation c’est ce qui dure. C’est ce qui est le plus difficile à prouver, renchérira-t-elle.   

Abdellatif Kissami fera le distinguo entre RSE et communication qui sont tous deux des métiers à part entière. Il évoquera l’obligation de communiquer aux entreprises cotées au Maroc, pour des besoins de transparence et de reddition des comptes. Dans le secteur minier, l’installation d’une unité exige d’office du développement durable, l’aménagement d’utilités (routes, voiries, installations d’eau courante, de lignes électriques, assainissement, etc.), mais aussi la réhabilitation d’espaces après exploitation… Toutefois, nuancera-t-il, cela se fera en concertation avec les autorités locales pour éviter de froisser qui que ce soit ou toute substitution au rôle régalien.

Transformacteurs et baromètre
Avant la clôture du forum par l’annonce du baromètre de la RSE des entreprises allant dans le sens de « Libérer le potentiel RSE des entreprises africaines » slogan du forum, la conférence 6, sur « Agilité et développement durable : la parole aux jeunes transformacteurs », a été modérée par Joël-Eric Missainhoun, Managing Partner, Afric Search, a réuni Aya Laraki, directrice générale de Cuimer et Khalid Baba, fondateur de Jibly (restauration rapide livrée en e-commerce).

Si Aya Laraki qui est dans la mode éthique, s’activant dans une maroquinerie révolutionnaire à base de peaux de poissons, connait le forum pour y avoir reçu un Prix l’année dernière, Khalid Baba, fondateur de Jibly, est novice parmi les Amis durables. Chacun d’eux a pu monter sa structure à partir d’idées, d’abord pour satisfaire un besoin plutôt que pour gagner de l’argent. Une démarche commune à la plupart des startups africaines qui réussissent.

Ces deux structures ont pu bénéficier d’un climat facile des affaires, où le statut d’auto-entrepreneur est légalisé (entreprise formelle qui peut être créée en ligne et sans obligation de comptabilité, avec une taxe de 1 à 2% du chiffre d’affaires), où les espaces de co-working et les incubateurs et autres accélérateurs et mentors ne manquent pas. Les uns et les autres ont été reconnaissants de tous ces avancées posées par les autorités publiques et qui ont permis ces possibles. C’est aussi cela la RSE, ont conclu les participants qui chacun a avoué avoir appris et passé d’excellents moments conviviaux et fort utiles.

Rendez-vous est désormais pris pour 2022 à Dubaï où se tiendra la 6ème édition de l’African Business & Social Responsability Forum.