L’entreprise NGE Impact, organisatrice de Hub Africa, et Valeur-Tech (France) ont organisé, du 24 au 27 septembre à Casablanca, la première édition de masterclass « AgriTech » avec la participation de start-up françaises et africaines qui ont développé des innovations technologiques pour différentes filières agricoles.
Reportage réalisé par Elimane Sembène
« Quand le digital fait grandir l’agriculture », tel est le thème de la première édition de l’évènement AgriTech qui s’est déroulée dans la capitale économique du Maroc. Une quinzaine de start-up spécialisées dans les technologies agricoles ont pris part à cette manifestation coorganisée par NGE Impact, organisateur de Hub Africa, et Valeur-Tech, cabinet français de conseil en nouvelles technologies agricoles.
Cette masterclass a démarré avec une séance inaugurale à Wired Startups, un espace de co-working dédié à l’innovation. Pendant presque une heure, Mohammed Zouhairi, chef de la division du partenariat et de la promotion de l’investissement à la direction de l’agrégation et du partenariat de l’Agence pour le développement agricole (ADA), et Moulay Rachid Cherkaoui, vice-président de MeM, 13ème région du patronat marocain (CGEM, Confédération générale des entreprises du Maroc), fondateur et PDG de MTech Invest, ont présenté les grandes lignes du Plan Maroc Vert (PMV), la stratégie agricole du royaume pour développer les différentes filières agricoles.
Ce plan contribue aujourd’hui à hauteur de 19% au PIB du Maroc et représente 11% des exportations, indique M. Zouhairi, non sans oublier de mentionner les opportunités d’investissements mises en place par le gouvernement pour attirer les investisseurs comme la mise à disposition de terrains agricoles de plus de 100 000 ha entre 17 et 40 ans, et le fonds de développement agricole pour soutenir les investisseurs privés.
De la viticulture…
M. Cherkaoui, pour sa part, a présenté un bilan concis et précis en mettant en exergue les réalisations dans les différentes filières, l’impact sur la consommation intérieure et les défis du PMV lancé en 2008 et qui aura nécessité plus de 105 milliards de dirhams d’investissements. Ce plan qui a favorisé une croissance de 7% du PIB agricole du Maroc et crée plus de 250 000 emplois fait face à plusieurs défis notamment dans la gestion de l’eau, des intrants, la vulgarisation des techniques agricoles, la formation et la logistique, l’agro-industrie, la R&D, le branding et la qualité. Les startuppers prennent note et partent à la rencontre des exploitants agricoles pour visualiser ces défis…
Direction Benslimane, une province de la région de Casablanca-Settat. Après plus d’une heure de route, nous voilà arrivés à l’usine Thalvin de Diana Holding implantée dans le Ryad du Vigneron. Après avoir alimenté notre estomac avec de copieux repas, il était temps d’alimenter la matière grise. Stéphane Mariot, œnologue-directeur du complexe, explique la chaîne de valeur de la production viticole, dont une grande bonne partie est écoulée sur le marché local, avant d’inviter la délégation à visiter l’usine pour comprendre les différentes phases de production.
…à l’arboriculture
Mardi 25 septembre, retour à la théorie et aux échanges d’expérience. La grande salle du Qualipôle, située au cœur de l’Agropolis de Meknès (région située à plus de 239 km de Casablanca), accueille les start-up. Dr Kamal Hidane, directeur régional de l’Agriculture et responsable du Cluster Agrinova, l’Association des industriels de l’Agropolis, des chercheurs et membres du cluster assistent à la présentation des solutions agricoles des différentes start-up avant d’exposer les problématiques de la filière agricole dans la région.
Après ces échanges fructueux, retour sur le terrain, plus précisément dans les « Domaines Zniber », situés à quelques encablures de l’Agropolis. Une gigantesque plantation de plus de 700 ha qui regroupe des vignobles, des exploitations arboricoles, une exploitation de trituration d’huile d’olives vierge et une grande pépinière. Une prairie qui a impressionné les startuppers qui écoutaient attentivement la présentation de Reda Zniber, directeur général délégué de l’entité, les explications scientifiques du gérant Abdelkader Chaddad et les démonstrations de Younes Belhcen, responsable de développement industriel dans l’usine de fabrication d’huile d’olives (Maâssera). Ce n’était certes pas la période de production, comme il l’a indiqué, mais la délégation a tout de même eu droit à une dégustation du délicieux liquide verdâtre et admiré les saveurs locales et exotiques…
Sans oublier les fruits rouges…
Mercredi 26 septembre, AgriTech installe ses quartiers dans la plantation rose de la Coopérative BestBerry, à Moulay Bousselham, une station balnéaire située dans la région de Rabat-Salé-Kénitra. Sous un soleil de plomb, loin de la brise marine, Nabil Belmkaddem, directeur de la coopérative (créée en 2017), et Chakib Laksiouar, un des membres, nous invitent à découvrir les fraisiers et framboisiers cultivés sous serre et tunnel dans ce champ de 10 ha. « Au total, on y cultive une centaine de fraisiers et une trentaine de framboisiers », nous souffle un des gérants de l’exploitation. Ces délicieux fruits rouges ont séduit les papilles gustatives des visiteurs. Les entrepreneurs agricoles ont pu comprendre la chaîne de valeur de ces cultures si complexes et si gourmandes en eau, de la cueillette à l’écoulement aux Pays-Bas via une multinationale californienne, en passant par le port de Tanger-Med (nord du Maroc). « La cueillette et l’export du produit ne doivent pas excéder cinq jours du fait de la fragilité des fruits », précise M. Belmkaddem. Les échanges se poursuivront au siège de la coopérative sur l’emballage et le conditionnement des barquettes de 125 grammes, dans un endroit tout frais, loin de la forte canicule estivale.
…et les légumes prêts à l’emploi
La délégation prend congé et part visiter une autre exploitation de fruits rouges, celle de Lotfi Ben Salah, un nouvel exploitant agricole et membre d’Interproberries, l’interprofession de la filière dont est également membre la Coopérative BestBerry. Il a aménagé en deux ans une plantation de 30 ha pour y cultiver des fraises et des framboises. Nous avons pu assister à une livraison, dans son champ, de fraisiers probablement venus d’Espagne, non loin du réfectoire réservé aux employés.
Jeudi 27 septembre, clap de fin des visites à Frêlug, une entreprise marocaine spécialisée dans la commercialisation de légumes frais crus, « lavés, épluchés et découpés », située dans la zone industrielle de Dar Bouazza à Casablanca. Les startuppers ont pu échanger avec Amina Oudghiri, fondatrice et présidente de l’entité pour mieux comprendre cette innovation.
Les entrepreneurs agricoles ont pu présenter leurs innovations technologiques à la séance inaugurale et au cours des différentes visites sur le terrain. Des capteurs météorologiques aux données précises et localisées, à la robotique, en passant par l’usage de drones pour cartographier les espaces cultivés, le contrôle de carburant et la géolocalisation du parc de véhicules et engins agricoles, la détection de certaines maladies, etc.
Après ce mini-marathon de 1500 km en quatre jours, les participants se sont réunis autour de délicieux plats de couscous jeudi après-midi au siège de NGE Impact à Casablanca pour recharger les batteries. Fin de la première édition d’AgriTech dans la joie, l’humour et la bonne humeur!