L’Afrique devrait réaliser une croissance de 3,1% en 2018 et 3,6% en moyenne en 2019, selon le dernier rapport Africa’s Pulse publié par la Banque mondiale, grâce notamment à la stabilité des cours des hydrocarbures et des métaux, la hausse des prix des matières premières et la baisse du taux d’inflation.
Dans son rapport semestriel qui analyse l’état des économies africaines, la Banque mondiale révèle une lente reprise de la croissance en Afrique. Celle-ci devrait atteindre 3,1% en 2018 et 3,6% en moyenne en 2019, loin de l’embellie (5,4%) observée durant la période 2010-2015. Elle note une reprise progressive de la croissance au Nigéria, en Angola et en Afrique du Sud, « les trois plus grandes économies de la région». Ces trois pays représentent à eux seuls 60% du PIB du continent.
Cependant, il existe des disparités selon les régions. Des pays d’Afrique de l’Est (comme le Rwanda, la Tanzanie et le Kenya) et ceux d’Afrique de l’Ouest (comme le Sénégal, le Ghana et la Côte d’Ivoire) enregistrent des taux de 6%, devançant leurs homologues d’Afrique centrale qui subissent les conséquences de la chute des prix du pétrole.
Concrètement, les pays de l’Uemoa maintiendront leur croissance solide, tirée par les investissements dans les infrastructures. On note également une amélioration de la croissance en Afrique de l’Est due à la croissance du secteur agricole «après plusieurs épisodes de sécheresse et de la remontée des crédits du secteur privé». L’Éthiopie, une des locomotives de la région, conservera sa forte croissance grâce aux investissements publics consacrés aux infrastructures. « La croissance a rebondi en Afrique subsaharienne, mais pas assez rapidement. Nous sommes encore loin des niveaux d’avant la crise. Les pays africains doivent in-tensifier et approfondir les réformes macroéconomiques et structurelles pour parvenir à des niveaux de croissance élevés et soutenus », constate Albert Zeufack, économiste en chef de la Banque mondiale pour la région Afrique.
Veiller à la soutenabilité de la dette
M. Zeufack note aussi une stabilisation du taux de change en Afrique, une baisse de l’inflation (taux supérieur à 25% dans moins de 5 pays alors qu’il se situait à près de 40% dans plusieurs pays), ainsi qu’une réduction des déficits budgétaires. Le rapport pointe du doigt deux facteurs de risques majeurs qui pourraient plomber la croissance des pays africains : la dette publique et l’instabilité des prix des matières premières. L’économiste constate «une hausse très rapide» de la dette en Afrique dont le niveau a été multiplié par quatre en moins de trois ans. En mars 2018, «18 pays étaient classés comme étant exposés à un risque élevé de surendettement contre 8 en 2013», selon la Banque mondiale. Il suggère aux États africains de réduire ce niveau d’endettement et veiller à la « soutenabilité» de cette dette. Quant à Punam Chuhan-Pole, économiste principale à la Banque mondiale et auteure du rapport, elle constate que les fluctuations des cours et de la production des matières premières menacent le redressement économique dans de nombreux pays du continent. «Cela montre combien il est important que les pays renforcent leur résilience en faisant des stratégies de diversification une priorité absolue», souligne-t-elle. Pour remédier à cette situation, M. Zeufack invite les pays africains à investir dans le digital et l’industrialisation pour accroître leur développement. « Il est important que l’Afrique repense son modèle d’industrialisation en exploitant les TIC», suggère-t-il. «Si elle adopte la technologie et met à profit l’innovation, l’Afrique peut accroître la productivité entre les secteurs et à l’intérieur de ceux-ci, et accélérer la croissance»
Par ailleurs, le rapport exhorte les États africains à investir davantage dans l’innovation pour lutter contre la pauvreté et améliorer le taux d’électrification qui s’établissait à 42% en moyenne en 2016 en Afrique subsaharienne. L’investissement du secteur privé dans « les mini-réseaux », «micro-réseaux » et « réseaux-domestiques » pourrait améliorer la situation. La levée des obstacles règlementaires et une transparence dans la gestion des entreprises d’électricité sont nécessaires pour relever ¢ce défi, précise-t-il.