Avec l’arrivée d’une nouvelle administration à la tête des États-Unis, première puissance mondiale, nous assistons à un mouvement de démondialisation marqué par un retour affirmé à la primauté des intérêts nationaux. Plus encore, des signes de techno-impérialisme se font de plus en plus pressants. L’irruption de Deepseek sur la scène mondiale en est une parfaite illustration : en publiant sous licence open source un modèle d’intelligence artificielle rivalisant directement avec ChatGPT, Gemini et d’autres géants du secteur, cette avancée bouleverse les rapports de force technologiques et redistribue les cartes d’une industrie stratégique.

En parallèle, l’Afrique voit émerger une quête croissante de souveraineté, marquée par des décisions historiques. Les pays de l’Alliance des États du Sahel (AES) ont acté le départ des forces françaises du Burkina Faso, du Mali et du Niger, rapidement suivis par des revendications similaires au Sénégal, au Tchad et, plus récemment, en Côte d’Ivoire. Cette dynamique ne se limite pas à la sphère politique : elle touche également l’économie, avec un contrôle accru des monnaies, des secteurs stratégiques et des ressources naturelles.

Dans un monde où la technologie évolue à un rythme effréné, la transformation structurelle des économies africaines devient une nécessité impérieuse. L’autonomie numérique, énergétique et industrielle ne doit plus être un idéal lointain mais un objectif stratégique à court terme.

Alors que nous célébrons les 70 ans du Mouvement des Non-Alignés, initié par la conférence de Bandung en 1955, un parallèle s’impose : et si l’Afrique s’inspirait des modèles économiques et politiques des pays d’Asie du Sud-Est ? Plutôt que d’être éternellement tiraillée entre les sphères d’influence des États-Unis, de la Chine et de la Russie, ne serait-il pas temps d’inventer une troisième voie, un modèle original qui place l’Afrique au centre de son propre destin ?

L’enjeu est limpide : offrir à nos populations, et surtout à notre jeunesse, les moyens de prospérer économiquement et technologiquement, en refusant d’être les otages de rivalités géopolitiques qui ne nous concernent pas.

La souveraineté africaine sera-t-elle enfin une réalité ou restera-t-elle un vœu pieux face aux nouveaux impérialismes ? La réponse dépendra de la capacité des leaders africains à traduire les aspirations populaires en actions concrètes, et à bâtir des alliances stratégiques qui servent en premier lieu les intérêts du continent.