De plus en plus de jeunes Guinéens se tournent vers la terre pour profiter des riches potentialités agricoles de leur pays et des nouvelles opportunités qu’offre ce secteur vital de l’économie nationale. Ces agripreneurs, généralement bien formés et très motivés, investissent l’arrière-pays où ils développent différentes filières propres à chacune des quatre régions naturelles de la Guinée… Pour de nombreux jeunes agripreneurs guinéens, le travail de la terre est une question d’éducation et de culture. C’est cas de Mamadou Maladho Diallo, un jeune fonctionnaire en service au Ministère des affaires étrangères et des Guinéens de l’étranger, qui s’investit parallèlement dans l’agriculture, à Dubréka, au nord-est de Conakry.

Très jeune, il avait appris avec son père (enseignant) à cultiver la pomme de terre, le riz et le maïs, entre autres; une bonne partie de la production étant destinée à la consommation familiale. Après ses études universitaires en lettres modernes et deux ans d’activité professionnelle, il a décidé de renouer avec l’activité agropastorale. «J’avais constaté que les légumes et les fruits sont rares sur le marché guinéen pendant la saison sèche et que, généralement, la production vient de loin. Pire encore, les jeunes sont absents au niveau de la production.

Je me suis dit que si je m’engageais à faire des pastèques, par exemple, cela allait beaucoup me rapporter. Ainsi je me suis ainsi rapproché des techniciens, pour maîtriser les contraintes liées au secteur et j’ai réuni des ingénieurs agronomes et d’autres jeunes engagés autour d’un projet», nous a-t-il expliqué. «Nous développons différentes filières, notamment la culture de pastèques, de tomates, de courgettes, de petits piments, de choux fleurs, de gombo, d noix d’acajou, de riz, d’arachides et de maïs, pendant la saison hivernale. Cette année nous avons commencé aussi dans l’agroforesterie et le gingembre.

Nous faisons aussi à coté de l’élevage notamment les poules pondeuse et bicyclette et l’élevage de petits ruminants (moutons, chèvres)», ajoute-t-il. De l’accès à la terre et aux financements Si l’accès à la terre est un casse-tête pour nombre de jeunes agripreneurs guinéens, Mamadou Maladho s’estime heureux sur ce plan, car sa ferme agro pastorale ESPOIR JEUNE disposerait d’un domaine approprié et suffisant. Mais, comme beaucoup d’autres, il se heurte à des problèmes de financements. « Il n’y a pas de banques agricoles en Guinée nous permettant d’accéder aux crédits pour avoir des machines afin d’accroitre notre production et la transformer sur place pour avoir toute la chaine de valeur. Nous sommes par ailleurs confrontés au vol de nos produits».

Comme lui, Abdourahmane Diallo, un autre jeune agripreneur guinéen, témoigne de ses difficultés d’accès au financement pour développer son activité sur un domaine familial à Kindia, la région fruitière de la Guinée. «Quand je me suis orienté vers les banques et les micro-finances, j’ai vu que je ne pouvais pas financer mes activités avec un emprunt. J’ai donc organisé une levée de fonds en publiant une annonce et en envoyant des mails à des personnes que je connais et que je sais détenir une épargne.

Certains m’ont suivi dans l’aventure alors que je ne les avais jamais croisés mais ils ont cru au projet et nous sommes aujourd’hui une vingtaine à avoir confié leurs épargnes à la Coopérative pour l’Agriculture et la Production Animale (CAPA)», a-t-il confié à African Business Journal dans un entretien (Voir notre entretien à la page…). Quid de la main d’œuvre Mamadou Koumba Condé, un jeune agroéconomiste de 24 ans dit avoir démissionné d’un poste de Directeur administratif et financier d’une entreprise à Conakry, pour aller s’investir dans l’agriculture à Forécariah où il dispose actuellement d’un domaine de deux hectares qu’il compte élargir à 25 hectares pour produire de la banane en quantité et en qualité. Pour son activité, il s’appuie sur une dizaine de jeunes qu’il a réussis à convaincre à le suivre dans le travail de la terre.

Ce qui n’est pas toujours facile, vu que les jeunes villageois sont généralement tentés par la vie en ville et par l’aventure périlleuse vers l’occident. «Ceux qui acceptent de travailler avec nous, nous assurons leurs repas quotidiens, leur logement et les payons à la fin de chaque mois un salaire 700.000 Francs guinéens (Environ 50.000 F CFA). En même temps ils apprennent de bonnes techniques agricoles avec nous», explique M. Condé.

Passer à l’action Les jeunes agripreneurs guinéens déplorent quasiment tous, le peu de soutien de l’Etat et des institutions nationales et internationales dédiées au monde agricoles en leur faveur. Ils estiment qu’il est temps de sortir des discours et de passer à l’action. Pour le Président de la BAD, les pays africains doivent l’agriculture profitable aux jeunes du continent car ce secteur est la clef pour sortir des millions de personnes de la pauvreté et empêcher la migration vers l’Europe.

L’ancien président nigérian, Olusegun Obasanjo, a estimé récemment que l’Afrique doit augmenter ses investissements dans l’agriculture, car la plus part des pays du continent sont loin de leur objectif de 10% des dépenses publiques totales ¢allouées au secteur.