Les violences post-électorales au Mozambique ont fortement secoué l’Afrique du Sud, son voisin immédiat, qui en subit les répercussions non seulement en termes d’afflux de réfugiés, mais aussi sur le plan économique. Dr Michael Masiapato, commissaire de l’Autorité de gestion des frontières sud-africaines, a ordonné la fermeture temporaire du poste frontière de Lebombo après avoir été informé d’incendies de véhicules côté mozambicain. Cette mesure vise à garantir la sécurité publique sud-africaine et celle des transporteurs transfrontaliers, voyageurs, commerçants, et fonctionnaires opérant au poste frontière.

La route traversant Lebombo est stratégique, avec près de 1 800 camions-marchandises y transitant chaque jour.

Une baisse des échanges commerciaux

Selon le ministre sud-africain des Finances, Enoch Godongwana, la fermeture du poste frontière a entraîné une baisse de 20 % des échanges commerciaux. Entre le 9 octobre 2024, date des élections mozambicaines, et le 6 décembre 2024, la balance commerciale entre les deux pays a enregistré une variation négative de 4,8 milliards de rands en valeur douanière.

Les exportations sud-africaines vers le Mozambique, comprenant principalement des alliages ferreux, du charbon, du minerai de chrome, du minerai de fer et des phosphates, ont chuté. En sens inverse, les importations sud-africaines depuis le Mozambique, telles que les produits pétroliers et les fils d’aluminium, ont également diminué.

Pour atténuer les perturbations, des accords alternatifs ont été conclus avec l’Eswatini, permettant de réacheminer le fret via le poste frontière de Namaacha.

Impact sur les secteurs stratégiques

La fermeture du poste frontière a des répercussions majeures sur l’industrie minière sud-africaine. Le Minerals Council South Africa souligne que cette décision pourrait accroître les coûts de transport pour les mineurs sud-africains. En 2023, 53 % des exportations sud-africaines de minerai et de concentré de chrome, soit 9,4 millions de tonnes, avaient transité par Maputo.

Selon Gavin Kelly, PDG de la Road Freight Association, l’industrie du fret perd environ 10 millions de rands par jour en raison des perturbations. À ce jour, ces pertes sont estimées à près de 5 milliards de rands, affectant notamment l’acheminement des marchandises fraîches et des produits essentiels, tout en privant le Mozambique de devises étrangères cruciales.

Conséquences locales

Les petits commerçants et le secteur hôtelier à proximité de la frontière souffrent également. Dans la ville sud-africaine de Komatipoort, des commerces de gros et de détail, dépendant de la clientèle mozambicaine de Ressano Garcia, ont été contraints de fermer temporairement. Les hôtels, confrontés à des annulations massives, ont procédé à des licenciements pour survivre, certaines entreprises déclarant une perte de 60 % de leur clientèle.

Une collaboration pour la sécurité

Dr Michael Masiapato affirme travailler en étroite collaboration avec les autorités mozambicaines et les forces de l’ordre sud-africaines pour surveiller la situation et rouvrir le poste frontière dès que cela sera possible en toute sécurité. Cependant, le passage des petits véhicules et des piétons se déroule encore sans entrave au poste frontière de Lebombo.

Un enjeu régional majeur

La fermeture de Lebombo survient à un moment critique pour les exportateurs sud-africains, qui dépendent de plus en plus du port de Maputo, désormais le hub portuaire de la sous-région. En 2023, le port de Maputo s’est classé 329e sur 405 ports dans l’indice de performance des ports à conteneurs de la Banque mondiale, surpassant Durban, relégué à la 399e place.

Le gouvernement sud-africain, conscient des enjeux économiques et sécuritaires, a engagé des pourparlers actifs avec son voisin mozambicain pour une résolution rapide de la crise. L’objectif est de rétablir la stabilité dans la région et de relancer les échanges commerciaux essentiels pour les deux économies.