Un modèle d’évaluation fonctionnelle à cinq pôles pour une appréciation générale et prospective.
• La fonction du système d’information (S.I) est-elle un simple outil se limitant à l’écriture de programmes ou fait-elle partie intégrante de sa stratégie de l’entreprise ?
• Comment le Modèle d’évaluation fonctionnelle (MEF) aide-t-il l’entreprise à évaluer la fonction système d’information, fonction support, dont la performance est difficile à formaliser ?
Idées clés
1- La mesure de la performance peut être relative mais reste indispensable à toute action de pilotage.
2- La recherche de la performance, initialement orientée vers les processus de production, s’intéresse aujourd’hui aux fonctions support. Le but étant, entre autres, de pouvoir se prononcer par rapport à la question de l’externalisation de ce type de fonctions.
3- Le système d’information est un outil de déploiement de la stratégie de l’organisation.
4- Le quatrième axe faisant partie du modèle de l’évaluation fonctionnelle du système d’information s’inscrit dans une démarche qualité. Le client (majoritairement interne et créateur de la valeur), est, en effet, considéré comme un élément central d’une bonne gestion.
Au sein d’une organisation, une fonction support est un ensemble de ressources réalisant différentes prestations pour les autres services, dans le but de favoriser l’activité de ces
derniers. Pour piloter une fonction support une méthode inédite et outillée pour mesurer la performance de la fonction système d’information et son évolution dans le temps. Le modèle d’évaluation fonctionnelle se décompose en quatre pôles qui définissent les composantes d’une fonction support. Il s’agit des pôles :
– Activités; – Compétences; – Organisation; – Clients
Par ailleurs, le Modèle d’Evaluation Fonctionnelle (MEF), est un modèle de pilotage permettant de produire des tableaux de bord pour les fonctions support. La structure de ce modèle est représentée par la figure 1.
Ce modèle essaye de répondre à la question : comment évaluer une fonction transverse d’une organisation ?
Pour piloter il faut mesurer pour pouvoir apprécier les performances réalisées et les écarts constatés. Figure 2. Les indicateurs proposés par le modèle d’évaluation fonctionnelle (taux de maitrise, taux de satisfaction,…) peuvent être intégrés dans les tableaux de bord de la fonction ou bien dans les tableaux de bord de l’organisation.
À cet égard, nous distinguerons :
• Les tableaux de bord par objectifs,
• Les tableaux de bord stratégiques avec les notions de Balanced Score- Card (B.S.C) dont la figure 3 reprend les quatre dimensions et de navigateur Skandia illustré par la figure 4.
Deux approches issues de la littérature managériale sont proposées en tant qu’outils de pilotage. Il s’agit de :
• OVAR (Objectifs, Variables d’action, Responsables),
• OFAI (Objectifs, Facteurs clés de succès, Actions, Indicateurs).
Les variables composant les outils de pilotage précités sont définies comme suit :
• Objectifs : orientation d’action chiffrée en relation avec la stratégie de l’organisation. Pour jouer pleinement
son rôle, un objectif doit être SMART: Spécifique (très précis en termes de périmètre), Mesurable (avoir obligatoirement une mesure quantitative), Accessible (suffisamment opérationnel pour être compris par tous), Rattaché à un projet (quelle est la finalité poursuivie par la réalisation de l’objectif ?) et Temps (défini dans le temps en termes d’échéance).
• Variable d’action : une action opérationnelle dont le résultat contribue à la réalisation d’un objectif. Elle a un coût et le résultat doit pouvoir être mesuré.
• Indicateur : peut être un repère chiffré pouvant être rapporté à un objectif, une moyenne ou un standard. L’indicateur permet de formaliser les engagements et de mettre en oeuvre des dispositifs de contrôle. Il existe cinq catégories d’indicateurs :
1. Indicateurs de coût;
2. Indicateurs de résultat;
3. Indicateurs d’activité;
4. Indicateurs de performance;
5. Indicateurs stratégiques.
➊ Evaluation des activités de la fonction système d’information
La collection « les baromètres de la performance » propose une méthode inédite d’évaluation des fonctions support à travers l’évaluation de quatre critères :
➤ Le référentiel d’activités
La réponse à la question : que doit faire la fonction S.I ?, nous permet de définir le périmètre de cette fonction. Autrement dit, il s’agit de décrire toutes les prestations qu’une fonction système d’information peut être amenée à réaliser pour le compte de ses clients internes. À cet égard, un modèle d’activités est proposé. Celui-ci est structuré en rubriques métiers, en pratiques et activités. Le modèle présenté à la figure 5, comprend cinq rubriques métiers, vingt pratiques et quatre-vingt activités dans une logique d’intégration. Il s’agit, en effet, des métiers suivants :
Le pilotage du département S.I :
Afin de mieux gérer le S.I, toute fonction doit être pilotée. En d’autres termes, celle-ci doit disposer d’une organisation, d’une stratégie, de modes de contrôle et de management. À ce titre, la rubrique pilotage est garante de la cohérence des actions internes ainsi que des liens avec l’externe, de la performance actuelle et future de l’organisation et du bon fonctionnement interne. La valeur ajoutée du pilotage se mesure dans :
• La capacité de la D.S.I à anticiper les évolutions technologiques (veille, prospective) et les besoins des métiers de l’entreprise (stratégie) et à les prendre en compte (management, compétences, coûts);
• La capacité à identifier les axes de progrès interne (audit);
• La capacité à gérer et à piloter différents projets (gestion du portefeuille des projets) et applications (urbanisme)
et à les faire évoluer.
La gestion de la relation avec les utilisateurs :
L’informatique n’est pas une fin en soi. C’est pour cette raison que la D.S.I vit pour et par ces utilisateurs. À ce titre, elle est considérée comme une fonction support au service des autres métiers. Son ambition est la suivante : garantir l’adéquation du S.I aux besoins de l’entreprise, actuels et futurs. En effet, cette ambition prend forme lors de la définition de la stratégie S.I dont le schéma directeur de la D.S.I présente les grands domaines S.I et les liens existants. La mise en place d’une telle stratégie nécessite au préalable de prévoir des mesures d’accompagnement du changement à chaque développement S.I majeur. Etant précisé que la conduite du changement est une démarche structurée et outillée. Elle comprend une phase de cadrage en début du projet, une phase de plan d’action et un dispositif de pilotage.
Le développement applicatif :
Dans la mesure où le S.I devra être une représentation du monde réel de l’organisation, il est déterminant de souligner à cet égard l’importance des actions suivantes :
• Récupérer les besoins des utilisateurs et les prendre en compte d’un point de vue technique;
• Exercer un pilotage rigoureux des projets et prendre les décisions adéquates;
• Rechercher l’adhésion et l’implication des utilisateurs à travers un dispositif d’accompagnement du changement.
La maintenance applicative : cette phase est une suite logique faisant partie du modèle des activités présenté figure 6.
En effet, son démarrage débute après la fin du développement applicatif. Cette rubrique regroupe les pratiques suivantes :
• le suivi d’exploitation,
• la gestion d’anomalies,
• la gestion de la documentation,
• les dispositifs de qualité,
• la sécurité et l’éthique des S.I.
La gestion de l’infrastructure technique : cet axe représente le socle pour toutes les prestations assurées par le S.I. La gestion de l’infrastructure regroupe les pratiques suivantes :
• le hard (matériel informatique,
• le soft (logiciels),
• les bases de données et leurs technologies de stockage,
• les réseaux et télécommunications.
En termes d’exigences, les utilisateurs ont beaucoup d’attentes vis-à-vis du dernier aspect de la rubrique pilotage.
Leurs attentes concernent la fiabilité à toute épreuve, en ce qui concerne le matériel et les données, performance et simplicité des logiciels et enfin, une très bonne disponibilité des réseaux.
– Le questionnaire d’évaluation des activités
Le présent référentiel qu’est le modèle d’activités avec ses cinq rubriques, peut être adapté par chaque organisation en fonction de sa stratégie en termes de S.I. Il constitue un référentiel pour toute action d’évaluation, de réorganisation et d’évolution de la fonction du système d’information. Un questionnaire dûment rempli, permet de savoir comment se positionne votre fonction système d’information.
– Le taux d’activité
Les différentes activités précitées font l’objet d’une évaluation, au regard des &pratiques réelles dans l’entreprise. L’objectif étant de déterminer, par rubrique et globalement, un taux d’activité. Il s’agit, en fait, de savoir, sur les quatre- vingt activités types recensées, le pourcentage de celles réalisées dans l’entreprise. Le taux d’activité permet ainsi de positionner la fonction système d’information sur une échelle de 0 à 100, avec quatre configurations types. Cette situation est illustrée par le tableau intitulé de la figure 7.
Le baromètre du taux d’activité fait ressortir quatre types de configurations. Il s’agit de :
• la configuration exhaustive : le S.I réalise entre 75 et 100% du référentiel d’activités. À ce titre la fonction est qualifiée d’innovante.
• la configuration développée : le S.I réalise entre 50 et 75% du référentiel d’activités. Il convient, cependant de s’interroger sur les activités non réalisées (gestion de la relation avec les utilisateurs).
• la configuration restreinte : le S.I réalise entre 25 et 50%. Il s’agit d’un fonctionnement orienté essentiellement sur le pilotage, avec en marge, quelques activités relevant du développement applicatif.
• la configuration minimaliste : le S.I réalise un taux d’activité inférieur à 25%. Ceci peut s’expliquer par le recours à des prestataires externes ou par la mise en place de progiciels nécessitant moins de développement et de maintenance d’application. Cependant, au regard d’un pareil taux d’activité, la question inhérente aux besoins de gestion et au positionnement de la fonction S.I revient avec force.
➋ les compétences des personnes
➤ Le référentiel des compétences
Il s’agit également à ce niveau de déterminer le référentiel des compétences afin de pouvoir mesurer la performance et de constater les éventuels écarts. Le référentiel des compétences est constitué de trois types de savoirs :
• les savoirs techniques: c’est le degré de maîtrise de la réalisation des activités.
• les savoirs comportementaux: il s’agit d’un type de compétence méconnue ayant un aspect communicationnel et relationnel. La maîtrise de ce savoir contribue dans la diffusion d’une culture S.I.
• les savoirs métier ou prospectives: l’importance de ce type de savoir incite l’organisation à faire bénéficier les nouvelles recrues d’une formation d’initiation pendant six mois afin qu’ils puissent mettre le lien entre ce qu’ils ont appris et la réalité du terrain sur lequel ils vont être mis à l’épreuve. Voir figure 8.
Le questionnaire d’évaluation des activités
Le référentiel ainsi établi permet à travers un questionnaire dont les réponses reflètent les connaissances des collaborateurs de la fonction S.I en termes des compétences techniques, comportementaux et métier. Voir figure 9.
➤ Le taux de maîtrise
L’évaluation globale qui en résulte des trois types de compétences permet de mesurer le taux de maîtrise et d’envisager des actions de formation. Voir figure 10 et figure 11. Le taux de maîtrise permet de positionner le niveau de compétence de la fonction S.I sur une échelle de 0 à 100 avec quatre configurations types sous la forme d’un baromètre. Figure 12.
➌ l’organisation du service
➤ Le référentiel structurel de la fonction
du système d’information
L’évaluation des ressources structurelles de la fonction système d’information est réalisée en procédant au calcul d’un taux de support structurel. Ce calcul est facilité par l’existence d’un référentiel structurel de la fonction S.I. ce référentiel s’articule autour des axes suivants :
• Le positionnement de la fonction S.I dans l’organigramme,
• Le fonctionnement interne,
• Les enjeux,
• Les ressources de la fonction.
➤ Le questionnaire d’évaluation
de la structure de la fonction système d’information
Les réponses apportées au questionnaire supportent un nombre de points et permettent, par conséquent, d’obtenir une moyenne pour chacune des parties et en global. Voir questionnaire d’évaluation de la structure de la fonction S.I. (voir figure 13).
➤ Le taux de support structurel
Les résultats du questionnaire précèdent permettent d’obtenir un taux de support structurel pour le positionnement, le fonctionnement, les enjeux et les ressources et en global comme le montrent le tableau intitulé : le taux de support structurel de la figure 14. Le taux de support structurel permet de dresser une évaluation de la fonction sur une échelle barométrique comme le montre le baromètre de la figure 15.
➍ la satisfaction des clients
➤ Le référentiel clients
La définition d’un référentiel clients passe par l’identification des différents clients de la fonction du système d’information. Ceux-ci sont au nombre de cinq. Il s’agit de :
• La direction générale,
• La ligne managériale,
• Les chefs de projet,
• Les utilisateurs du système d’information,
• Les prestataires externes.
➤ Le questionnaire d’évaluation de la satisfaction clients
Le référentiel des couples produits/ clients constitue la base du questionnaire d’évaluation de la satisfaction client. Il s’agit de sélectionner l’une des réponses suivantes :
• Très satisfait.
• Satisfait.
• Peu satisfait.
• Non satisfait.
Ceci permet de déterminer un taux en attribuant une valeur qualitative pour chacune d’elle.
➤ Le taux de satisfaction clients
Le taux de satisfaction clients est obtenu en déterminant la moyenne des différents taux correspondant aux différents niveaux (Voir figure 16). En fonction de sa valeur, le taux de satisfaction client illustre quatre configurations types de la fonction système d’information, comme le montre la figure 17.
Evaluation globale de la fonction système d’information
Au terme de la présentation du Modèle d’Evaluation Fonctionnelle appliqué à la fonction du système d’information, une analyse globale regroupant les quatre pôles de ce modèle, permet de positionner cette fonction sur une échelle et de lui associer un type dont les caractéristiques sont de nature à nous renseigner sur son fonctionnement et sa progression (Voir figure 18).
Analyse globale
L’administration des différents questionnaires et l’utilisation des référentiels d’activités, de compétences, de support structurel et de satisfaction client permettent d’obtenir différentes évaluations.
Le baromètre de la performance globale
Le baromètre global, qui n’est autre qu’une moyenne simple ou pondérée des quatre dimensions nous donne une évaluation de la performance de la fonction du système d’information par une valeur quantitative comprise entre 0 et 100 et des indications qualitative permettant de situer le niveau de la fonction analysée. Il s’agit des fonctions qualitatives suivantes :
– La fonction «Excellente»
– La fonction «Satisfaisante»
– La fonction «À améliorer»
– La fonction «À risque »
Les matrices qualitatives
Pour compléter les analyses précédentes, le taux de performance fonctionnel ou les taux d’activité, de maîtrise, de support structurel et de satisfaction, qui sont les repères de gestion, peuvent être mis à contribution pour la construction de matrices qualitatives. Ces matrices sont les énumérées par ce qui suivra.
La matrice d’analyse stratégique
Selon les entreprises, la fonction du système d’information n’a pas la même importance stratégique. Cependant, il est important pour une entreprise de lier l’évaluation de la performance au positionnement qu’elle souhaite donner à la fonction système d’information. Ce positionnement peut se faire grâce à la matrice d’analyse stratégique.
Celle-ci catégorise la fonction selon deux axes :
– L’importance stratégique
– Le taux de performance
La matrice multidimensionnelle
La matrice multidimensionnelle permet de d’établir un diagnostic qualitatif à partir des quatre taux d’évaluation constituant le taux de performance global. Sur l’axe des ordonnées on distingue les quatre niveaux d’analyse du modèle (client, compétences, activités, structure) et sur l’axe des abscisses nous retrouvons les valeurs des taux de maîtrise, de compétences, d’activités, de support structurel et de satisfaction. Parmi lesdites valeurs seul la valeur 50 figure sur cet axe afin de pouvoir distinguer de part et d’autre un environnement de performance et un autre de contre-performance. Ainsi nous pouvons apprécier à chaque niveau le type de système d’information et juger si ce dernier est performant ou nécessitant une évolution et des transformations. Le besoin d’évaluation d’une fonction support et de la mesure de sa performance répond à deux exigences.
a – Celle de surveiller la performance de la fonction S.I et prendre les mesures qui s’imposent afin de réduire les écarts lorsqu’ils sont constatés. Ceci est possible grâce au modèle d’évaluation fonctionnelle (MEF) appliqué aux fonctions support et autres dispositifs de gestion transverse.
b – L’autre exigence est relative à la problématique de l’externalisation. En effet, la question de la performance pour ce type de fonction se pose en termes financiers mais également en termes stratégiques, lorsqu’il s’agit de savoir s’il faut externaliser la fonction S.I ou la maintenir en interne? Quoique la décision d’externaliser tout ou partie de la fonction du système d’information puisse s’appuyer sur des arguments, il n’en demeure pas moins que ce choix relève du domaine stratégique.
Par Khalid MOUMEN, Expert Consultant