C’est un spectacle apocalyptique qui a été vécu, le 25 juin 2022, à la frontière entre le Maroc et l’Espagne, autour de l’enclave espagnole de Melilla, jouxtant la ville marocaine de Nador, ou plus de 30 migrants noirs africains ont été tués sous les coups de policiers et gendarmes marocains. Une tentative par la force de plusieurs d’entre eux a été ainsi sévèrement matée.
Daouda MBaye
Plus jamais ça ! Les images se passent de tout commentaire. Il s’agit de policiers et gendarmes marocains, armés jusqu’aux dents, en train de tabasser- le mot n’est pas trop fort- du migrant subsaharien, à l’aide de gourdins, brodequins et coups de poing ! Un des policiers n’a pas hésité à faire valdinguer l’un d’eux qui a eu le culot de se relever pour tenter de fuir, dans la mare de corps inanimés, gisant sur le sol. Un autre subira le même sort, près de la ceinture compacte de forces de l’ordre marocaine.
Des informations recueillies auprès d’ONG marocaines et espagnoles font état de quelque 113 qui ont pu réussir à atteindre l’enclave espagnole, dont un serait hospitalisé. Quant à ceux qui ont échoué, leur sort est pitoyable. L’assaut des forces marocaines sur eux a été jugé comme une réponse disproportionnée. Omar Naji, vice-président à Nador de l’AMDH (Association marocaine des droits de l’homme) a révélé : « Il y a des migrants qui sont restés au sol, blessés, en train de saigner, pendant des heures au soleil, sans que les autorités marocaines ou espagnoles ne leur procurent les secours nécessaires. »
Depuis la normalisation des relations entre le Maroc et l’Espagne au mois de mars dernier, après une brouille diplomatique d’un an, c’était peut-être une manière de démonter une tolérance zéro sur cette frontière de l’UE en sol africain ! Vous ne rêvez pas, nous sommes bien au 21ème siècle dans cette vaste planète bleue, où des partages iniques, qui ont généré bien des différends autour du port de Fuime, du couloir de Dantzig, des deux Chypres, du rocher de Gibraltar, des enclaves de Sebta et Melilla… continuent de nourrir des drames atroces.
Dans l’attente de l’ouverture d’une enquête sérieuse
Tous les esprits, dotés d’un tant soit peu d’humanisme, ont condamné ce qui s’est produit le 25 juin entre Nador et Melilla. Si le Premier ministre espagnol, Pedro Sanchez pointe du doigt des mafias de trafiquants humains, sans émettre aucune action contre celles-ci, côté marocain, la diplomatie marocaine a tout au plus convoqué quelques ambassadeurs, accueillis par un représentant du ministre. A l’issue de cette rencontre, certaines déclarations de plénipotentiaires ont fait un tollé sur la toile…
Au Sénégal, l’organisation internationale de défense des migrants, Boubacar Sèye, Président de Horizon sans frontières (HSF), a « condamné avec la plus grande fermeté la mort de ces migrants ».
De toutes les façons, la Cour Européenne des droits de l’homme et les Nations Unies, l’Union africaine, ainsi que Human Right Watch sont interpelés pour l’ouverture d’une enquête très sérieuse. Les auteurs de ces crimes doivent payer.
Parmi les fautifs, figurent aussi les gouvernements fantoches d’Etats, où la surabondance qualifie toutes les ressources, pendant que paradoxalement les populations dépossédées crèvent la dalle, faute de politiques de développement inclusif à même de créer des conditions de souveraineté économique.