Après ses études en France et au Canada, Salem Massalha décide de rentrer au bercail pour cofonder Bassita. Selon lui, l’Afrique doit vendre son propre modèle à l’Occident.
«J’ai grandi en France et fais mes études au Canada avec toujours l’objectif de retourner en Afrique. La première raison vient du cœur, la seconde est liée à l’environnement économique et social.» Ce défi socio-économique Salem l’a relevé grâce au clickfunding. «Ce que nous avons accompli en trois ans à travers Bassita, nous n’aurions pas pu le faire en Europe. Malgré une économie peu stable, l’Égypte est un pays ouvert aux start-up. La souplesse juridique, des taux fiscaux simples et avantageux, des talents accessibles en termes de ressources humaines… permettent de commencer avec peu d’apport financier et sans se soucier des contraintes administratives parfois très pesantes en Europe», explique le jeune entrepreneur.
Créer des modèles made in Africa
D’après l’ingénieur égyptien, les entrepreneurs du continent doivent développer des projets qui correspondent aux besoins des populations. «Les innovations réalisées dans les pays Nord sont puissantes, mais peu d’entre elles peuvent être dupliquées et adaptées à l’Afrique. Il faut donc innover dans un prisme africain, c’est à dire dans une logique adaptée aux besoins et à l’environnement du continent. Le clickfunding est un exemple d’innovation provenant du Sud et qui répond aux besoins du Sud.»
Mieux, selon lui, l’Afrique ne doit pas se contenter de recevoir des produits occidentaux, elle doit être aussi une usine pour ces pays. «La plupart des innovations du Nord cherchent à s’implanter en Afrique où le potentiel est énorme. Il faut inverser ce schéma. Aujourd’hui lorsque l’on parle d’une innovation du Sud qui marcherait au Nord, cela fait encore sourire. Comme si l’innovation n’allait que dans un seul sens», déplore-t-il.
Dupliquer le clickfunding ailleurs
La diaspora africaine doit être la locomotive de changement de cap, car elle «est formée et éduquée, elle a un pied sur les deux continents ce qui lui permet de s’inspirer des meilleures expériences dans les deux camps». Pour ce faire, les États doivent lui faciliter l’accès aux financements, un casse-tête pour bon nombre d’entrepreneurs africains.
Les deux cofondateurs envisagent d’exporter le clickfunding dans d’autres pays africains, voire en Europe. «Notre objectif à court terme est d’exporter l’expérience du clickfunding ailleurs qu’en Égypte. Les investisseurs européens semblent encore réticents à accepter qu’un modèle africain puisse marcher en Europe. Et au sein de l’Afrique, l’accès au capital est restreint. C’est là notre plus gros challenge.» Ils souhaitent aussi se consacrer à des causes culturelles et environnementales. «Il s’agira, par exemple, de permettre à de jeunes artistes de financer leurs projets et aussi de permettre un environnement plus propre tel que le nettoyage du Nil», annonce Salem. Présentement, la start-up a lancé une campagne pour financer la création du premier laboratoire d’idées à Suez pour de jeunes entrepreneurs.
Par E.S.