Tous les experts du changement vous le confirmeront. Changer c’est d’abord accepter que l’on ne peut plus continuer, avec le même état d’esprit et les mêmes pratiques.
On le voit bien, nous arrivons au terme d’une période ; et une autre doit démarrer. Entre les deux, nous sommes précisément à ce moment du Kairos grec, en langage courant de basculement décisif, dont l’intensité n’est pas perceptible avec une montre, mais où tout est question de ressenti. C’est le moment de l’émergence et du développement économique. De même, le chef d’entreprise exposé à la sanction du marché et à la concurrence de nouveaux entrants ne peut plus fonctionner avec un modèle basé sur le «business as usual», de même les décideurs de la sphère publique ne peuvent plus utiliser les méthodes surannées pour faire face aux défis actuels .
Tout le monde a bien conscience que ce qui retarde l’émergence, ce n’est ni la technologie, ni la disponibilité des ressources, mais les mentalités qui ne sont pas en phase avec le niveau d’exigence de l’heure. De ce point de vue, il faut un changement radical de mindset dans nos pays, ce logiciel des comportements humains, si l’on veut entrer dans le train du développement. Howard GARDNER, un des psychosociologues les plus doués de sa génération et professeur à Harvard, nous rappelle dans un ouvrage remarquable* que sept facteurs clés peuvent accélérer le changement d’état d’esprit : la raison, la recherche, la résonance, les re-descriptions représentatives, les ressources et récompenses, les évènements du monde réel et les résistances.
En effet, accentuer le risque de changement d’état d’esprit c’est multiplier les représentations tangibles d’un concept comme celui de l’émergence, les rendre plus «palpables» afin que toutes les couches de la société, quelque soit leur niveau, s’y retrouvent et traduisent dans leur quotidien ce à quoi cela peut correspondre en termes de niveau et de qualité de vie, d’accès équitable aux services publics, de disponibilité en quantité et en qualité de loisirs, bref de mieux-être.
Nos dirigeants possèdent un potentiel énorme pour faire évoluer les esprits, voire les faire changer radicalement des fois. L’utilisent-ils suffisamment ? Mon sentiment est mitigé. Faire évoluer et/ou changer l’état d’esprit d’une Nation c’est raconter une histoire, celle de la nécessité de changer, et l’incarner pour qu’elle devienne réalité.