«Nulle fatalité qui tienne, le monde n’a pas de destin. Aux hommes de choisir leur avenir, avant que le futur le leur impose»

Nous avons à revisiter notre rapport au temps. En effet, au temps tactique, il nous faut substituer un temps plus stratégique. Cela ne peut se faire que si nos décideurs, surtout publics, pensent en hommes d’action, tout comme nos acteurs économiques doivent davantage agir en hommes de pensée. Nous voyons les limites d’un modèle qui a versé dans les excès du court-termisme, au détriment des enjeux stratégiques, pour finalement faillir dans sa mission d’apporter une croissance durable et le développement. Le secteur de l’Agriculture, comme le démontre le Pr. Moussa SECK dans l’entretien qu’il nous a accordé, l’illustre parfaitement. En effet, quoi de plus élémentaire que de nourrir sa population, et pourtant la combinaison de plusieurs facteurs laisse présager une montée de l’insécurité alimentaire. Au facteur démographique qui verra la population africaine croître de 55% d’içi 2033, il faut ajouter les conflits autour de l’or bleu. A cela, s’ajoute l’empreinte aquatique, autrement dit, la quantité d’eau nécessaire à la production des produits alimentaires. Quand on songe qu’il faut 178 litres d’eau pour bénéficier d’un verre de jus d’orange, 2600 litres pour un steak, et 11.000 litres pour un kg de textile, on ne peut manquer d’être interpelé. Sans oublier, la raréfaction des terres arables qui donne lieu à un véritable Monopoly en termes de transactions publiques et privées de terres agricoles, entre les pays qui disposent de terres fertiles abondantes et ceux qui n’en n’ont pas. Toutes ces questions méritent une approche stratégique. Les actions entreprises aujourd’hui ne produiront pas d’effet dans les deux ou trois prochaines années, mais dans les vingt-cinq voire cinquante prochaines. Nous vous gratifions à cette occasion, d’un dossier consacré à la «Stratégie», et notamment à une militarisation croissante du concept, même si la Stratégie tire son origine de ce monde qui affectionne tant le vocable de «manœuvres stratégiques». C’est que les batailles à venir, sans nécessairement être des batailles militaires, n’en demeurent pas moins des batailles pour le contrôle de territoires: qu’il s’agisse de territoires agricoles, de la conquête de l’espace, ou de plus en plus de territoires immatériels avec toutes les promesses de dématérialisation liées aux technologies de l’information. Enfin, nous consacrons un dossier aux « African Valleys », ces Silicon Valley africaines que l’on voit fleurir de Casablanca à Johannesburg et d’Accra à Nairobi, Ce secteur connaît une véritable effervescence avec pas moins de cinquante Technoparcs répartis sur tout le continent. L’émergence croissante d’une classe moyenne africaine de 300 millions d’habitants et l’équipement de cette cible, créent un socle propice à l’innovation sans laquelle, le développement évoqué plus haut n’aura pas lieu. Déjà des équipementiers africains proposent des tablettes, smartphones et autres ordinateurs. Sans doute, dans un proche avenir, les prix seront de plus en plus attractifs et favoriseront la multiplication des usages liés aux technologies de l’information. Le développement des « African Valleys », couplé à des stratégies territoriales intégrées, offrent ainsi une occasion unique de diversifier les sources d’activités économiques pour contribuer à l’émergence de véritables pôles de compétitivité, et pépinières d’entreprises. ¢A la résignation du présent, préférons de construire l’avenir.