« Le Covid-19 confirmela nécessité d’innovationdans le secteur des assurances »

L’assurance, à l’instar d’autres secteurs, subit les conséquences du Covid-19. Quelles sont les branches les plus impactées ?

Le secteur des assurances n’échappe pas aux impacts négatifs liés à la pandémie de Covid-19. En accord avec leur niveau d’exposition et de la nature des risques couverts, chacune des branches d’assurance va connaitre un impact différencié dans le temps, tant au niveau des primes émises (chiffres d’affaires) que des sinistres. Les dernières estimations de Sigma en date du mois de mars 2020 tablent sur une baisse de la croissance, en 2020, dans les économies africaines à hauteur de -2,5%. Cette tendance baissière est confirmée par le dernier rapport de la Banque mondiale, ce qui constitue une première en Afrique après plus de 25 ans de croissance.

Compte tenu de la corrélation positive entre le taux de croissance du PIB et le secteur des assurances, nous nous attendons à enregistrer une baisse à minima à la hauteur de cette contre-performance sur les branches IARDT (Automobile et les Risques divers), en dehors des contrats traitant de la santé et de la sécurité des assurés. Les économies des pays de la SADC (Southern African Development Community) risquent de clôturer l’année 2020 avec une baisse de leur PIB. Dans les économies de la région MENA (Middle East & North Africa), les prévisions au 1er avril 2020 de la Banque mondiale annoncent un recul du PIB de -1,1 % en 2020. Chacun des marchés du continent a enregistré des baisses de chiffre d’affaires sur ces deux branches précitées, mais avec des importances relatives.

Les importantes baisses du PIB dans les zones UEMOA et CIMA (Conférence interafricaine des marchés d’assurance), respectivement estimées à 2,4% environ et 3,7% en 2020 selon les projections de la Banque mondiale, ne risquent-elles pas d’avoir de lourdes incidences sur les chiffres d’affaires des compagnies d’assurances ?

Il existe une corrélation positive entre l’augmentation du PIB et le niveau des chiffres d’affaires dans les compagnies d’assurances. A quelques exceptions près, la taille de l’économie détermine l’importance du secteur des assurances. La relation entre le niveau du PIB et le niveau d’émission de primes d’assurance peut être appréciée, en outre, par le taux de pénétration. Dans l’espace FANAF ( Fédération des sociétés d’assurances de droit national africaines, ndlr), le taux de pénétration calculé sur les dernières données disponibles de 2018 est de 0,31%, soit un chiffre d’affaires global de 0,745 milliard de dollars US et un PIB global de 243 milliards de dollars US. Au passage, il convient de préciser que le taux de pénétration dans l’espace FANAF est très faible comparativement à celui de l’Afrique du Sud (13,01%), du Maroc (3,78%), du Kenya (2,42%), à la même période.

Un recul du PIB de 2,4% dans la zone UEMOA et de 3,7% dans la zone CIMA va certainement impacter négativement le volume du chiffre d’affaires dans les compagnies d’assurances de l’espace CIMA au titre de l’année 2020, voire sur l’année suivante.

On constate des tensions entre des entreprises et des compagnies d’assurances sur l’indemnisation pour pertes d’exploitation. En Afrique du Sud par exemple, les sociétés d’hôtellerie poursuivent actuellement en justice Santam (plus grand assureur du pays) qui refuse de couvrir les pertes résultant du confinement, estimant que la pandémie et le confinement sont deux événements distincts. Comment l’assuré pourrait rattraper les pertes engendrées par l’arrêt de son activité, sans recourir à son contrat d’assurance ?

La pandémie a eu des conséquences néfastes sur plusieurs secteurs économiques. Les pertes subies par les acteurs économiques sont importantes surtout dans des secteurs comme l’hôtellerie, le transport aérien… Ces pertes d’exploitation occasionnées par la pandémie, s’ils font l’objet d’exclusion sur les garanties couvertes par le contrat d’assurance qui lie l’assureur à l’assuré, ne pourront pas être admises en indemnisation. Il faudra analyser les clauses contractuelles qui ne sont pas forcément identiques sur les différents marchés, même s’il y a une tendance générale d’exclusion des risques pandémiques dans les contrats types.

Dans le cas où la perte d’exploitation n’est pas prise en charge par l’assureur, l’assuré pourrait bénéficier des plans d’aides prévus par plusieurs Etats afin de relancer leurs économies. Dans l’espace CIMA, nos Etats ont pratiquement bénéficié de mesures d’assouplissement de leurs dettes contractées auprès des institutions internationales. D’aucuns ont obtenu des appuis internationaux pour faire face aux impacts économiques et sanitaires de la pandémie. A mon avis, les plans de relance prévus devraient intégrer en premier lieu les secteurs et les acteurs économiques fortement éprouvés par le Covid-19, si ce n’est déjà fait.

La pandémie de Covid-19 aura eu le mérite d’attirer notre attention sur la nécessité d’orienter notre secteur sur les innovations pressantes à mener (digital) et la politique de couverture (nature des risques) : l’assureur ne peut pas être en marge de son économie !